Hanel, c'est simple, c'est le garçon frileux qui a toujours froid. Il est rare de le voir sans une écharpe ou une veste, et il n'y a bien qu'au plus fort de l'été qu'il se balade en short, osant montrer ses poignets squelettiques et ses jambes fines sans le couvert d'un pantalon. Qu'importe que celui-çi soit près du corps, ce n'est pas tant la minceur ou la maigreur que l'impression d'être laid qui l'empèche de se montrer, et s'il pouvait éviter de le faire, sans en mourir de chaud, il le ferait certainement. Ses cheveux sont la plupart du temps teints en roux, voir rouges, comme pour choquer le monde, mais surtout lui rappeler qu'il existe et peut être aperçu par les autres. C'est bien la seule chose qu'il aime en lui, d'ailleurs. Même si leur couleur naturelle n'est pas si horrible que ça, ressembler à un haricot rouge lui met le matin le sourire au lèvres et il sait que les gens vont le regarder d'un air désapprobateur ; c'est son petit moment de rébellion qui lui permet de souffler et de s'en prendre aux adultes sans en avoir l'air. Que sa famille déteste ça est un bonus. Même s'il n'est pas un féru de mode, ses vètements sont toujours bien coupés, faits pour qu'il les porte, et il ne lui est que rarement arrivé de porter quelque chose qui l'enlaidisse, et il affectionne les pulls larges, ceux qui cachent ses épaules trop fines et son manque d'abdos et de pectoraux. Il a toujours une moue adorable sur le visage, qui donne à ses joues une allure de hamster, et il sait très bien faire le regard du petit chien battu, pour éviter de se faire taper dans les moments difficiles ; et gagner l'affection de certaines personnes afin de les aider contre leur gré. Il ne pleure pas souvent et a toujours le sourire, mais quand il est malheureux on a toujours envie de lui faire un câlin, il faut dire que son regard triste est de ceux qui vous donnent des remords dans la nuit. Il est tatoué sur le haut du torse mais ne laisse pas souvent ça se voir, surtout que ses parents ne sont pas au courant et rares sont les élus à l'avoir vu en entier et donc à savoir quelle est cette phrase qu'il s'est gravé. Il ne fait pas beaucoup attention à son apparence, détestant tout ce qui s'apparente à de la manucure ou à des soins capillaires, et complexe sur son poids, mais malgré tous ses efforts, il n'arrive pas à prendre plus de muscles. Condamné à rester un adolescent rachitique et très peu viril.

Que dire de Hanel. À nom atypique, personnalité atypique, sans aucun doute. Ce bonhomme paraît au premier abord très ouvert, très facile à aborder – et à abuser – mais dans le fond, il ne fait confiance quasiment à personne. Il a toujours un sourire poli sur le visage, et parfois même il se perd dans ses masques et a l'air vraiment heureux, mais tout n'est que miroirs déformants qui lui renvoient une image qu'il déteste. Hanel, au départ, c'est un garçon qui se déteste lui même. Tout y passe ; son apparence, son poids, sa taille, ses cheveux, sa naissance, et même son intelligence. Petit il se faisait tourmenter parce qu'il n'était pas travailleur, maintenant, parce qu'on le dit trop intelligent. Fainéant. A force de critiques, il a appris à ne pas s'aimer et à se déprécier devant tout le monde ; il accepte mal les compliments, est mal à l'aise quand on le félicite, mais ne sera que trop d'accord avec les gens qui le trouvent nuls, il ira même les fréquenter comme s'il cherchait le baton pour se faire battre. Ce dont il n'a pas honte, par contre, c'est d'apprécier la beauté en chaque être, au fond de chaque âme. A part lui, il pense que tout le monde à droit à une seconde chance, et que tout le monde est parfait. Aussi, le fait qu'il soit bi ne l'a jamais dérangé, et il n'apprécie pas vraiment les gens qui critiquent ce choix. Même s'il ne dira rien quand les critiques lui sont adressés, bien entendu.
Il n'aime pas que les autres soient malheureux, aussi passe-t-il son temps à leur remonter le moral. Il a presque un sixième sens qui lui fait ressentir lorsque quelqu'un cache derrière un sourire un mal être profond, et propose son aide quitte à se faire refouler. Il n'aime pas voir la tristesse, sans doute parce qu'elle lui renvoie sa propre image, et nombreux sont les gens qui peuvent témoigner qu'il fera des pieds et des mains pour rendre la joie, quitte à se blesser dans le processus.
Il est également assez casse-cou, sans le vouloir, se mettant dans les ennuis d'un mot candide dont il ne considère que trop tard la portée. Innocent, naif, sans doute ; il croit que toute question est bonne à poser, et que l'on ne doit point mentir. Quitte à se retrouver jusqu'au cou dans les problèmes, de toute façon, il finira par trouver un moyen de s'en sortir, non ? Et s'il n'en trouve pas, il acceptera son sort en silence, puisqu'il le mérite.
Ajoutons donc à cela une pointe de réverie, qui fait qu'il est souvent dans la lune ; la chose qui exaspère ses professeurs. Cependant, réveur ne veut pas dire inattentif, et si sa participation en cours laisse à désirer, ses notes ne s'en ressentent pas. C'est un de ses enfants que l'école ennuie et qui rêve de grands espaces, de terrain où courir jusqu'à s'effondrer d'une crampe. Il n'a jamais supporté réellement l'enfermement et les espaces clos, et dés que cela lui est possible il fuit les classes pour rejoindre le toit, ou un endroit aéré et loin des autres. Ce n'est pas parce qu'il les aident qu'il veut toujours subir leur présence, après tout. Cette tendance à la fuite se doublant malheureusement d'une facheuse d'habitude de ne pas regarder ou il met les pieds, il est très très souvent perdu. Jusqu'à maintenant, il a toujours fini par retrouver son chemin, s'aidant d'arbres, de fleurs, de magasins, mais c'est aussi souvent une personne qui l'a découvert tournant en rond, l'air stressé, au beau milieu de nul part.
En somme, c'est un petit être assez spécial auquel on s'attache surement vite. Il ne faut juste pas s'attendre à ce qu'il vous montre son affection en retour, tant il ne croit pas avoir le droit d'en bénéficier.

La vie n'est pas toujours rose, et pourtant celle de Hanel avait bien commencé ; l'amour entre ses deux parents, qui formaient un couple dans lequel les disputes étaient inexistantes. D'aussi loin qu'il ne se souvienne, il n'y a jamais eu discorde sur quelque sujet que ce soit, et la seule personne contre laquelle ses deux là s'énervaient, c'était contre lui lorsqu'il faisait une bétise. Même lorsqu'ils se chamaillaient, c'était bon enfant, et Hanel était ravi de pouvoir dire à tous que ses parents s'aimaient. Un fait qui de nos jours devient plus dur à trouver, à croire, et surtout à conserver. Choyé mais jamais gaté à outrance, il s'est toujours contenté de sa place d'enfant unique. Sa mère, Kami, n'étant qu'une demoiselle menue, elle ne souhaitait pas subir une nouvelle fois les douleurs de l'accouchement, et voulait le meilleur pour son fils, si bien que son père, Jin, n'avait jamais cherché à parler d'un futur autre enfant, bien qu'il soit d'une famille nombreuse et craignait que Hanel ne s'ennuie.
Mais Hanel ne s'ennuyait jamais. Il avait toujours quelque chose sur lequel s'extasier, un nouvel ami à présenter à ses parents, un camarade de jardin d'enfants, une amoureuse de la crèche ou de la piscine, des animaux perdus qu'il recueillait, qu'ils soient rats, lapins, chiens ou même lézards. Un enfant comme les autres. Ce ne fut qu'une fois à l'école que Hanel commença à s'ennuyer. Il n'aimait pas rester assis, ayant toujours été un enfant d'extérieur, et s'il n'était pas non plus turbulent, les remarques se faisaient nombreuses à ses parents à la sortie des cours. Les professeurs n'y allaient pas de mains mortes, allant même jusqu'à dire qu'il devait être un peu idiot et ferait mieux de rejoindre une école spécialisée. Les parents du petit garçon le firent depuis changer fréquemment d'écoles, pour se voir opposer toujours le même constat. L'école n'était pas sa place. Ce n'était pas une question de niveau, puisqu'il s'en sortait toujours avec la moyenne, mais il n'était qu'embarras pour les autres enfants qui ne supportaient pas de le voir bailler aux corneilles et faire du bruit sans s'en rendre compte pendant qu'il travaillait. C'est à peu près vers cette époque que les parents d'Hanel se mirent à le réprimander de plus en plus, vers 10 ans, lui expliquant qu'il devait au moins s’intéresser à ce que racontait les professeurs sans quoi il ne trouverait jamais un métier plus tard, et ne serait qu'un poids pour la société. Mais rien ne lui faisait envie. À quoi bon apprendre des dates dont au final les gens ne se souciaient pas ? L'histoire n'était qu'une vaste répétition des mêmes erreurs. Pourquoi tout le monde aurait du savoir à quoi servait la physique ? Ce n'était pas comme s'il allait un jour s'amuser à calculer les éléments compris dans un sandwich. Et ainsi de suite. Il ne trouvait d'application pratique à rien, et bien que les livres lui plaisaient, il savait déjà qu'il n'aurait pas le niveau pour en écrire de semblables, aussi, à quoi bon s’intéresser à l'écriture.
Il enchaina les sports, après qu'une jeune voisine ait fait la remarque qu'il devait avoir trop d'énergie non utilisée, mais de même, rien ne retint longtemps son attention. Il n'avait pas l'esprit de compétition, ni celui d'équipe, s'insurgeait souvent contre des règles qu'il trouvait inutile, et refusait même d'attaquer son adversaire au karaté. Sous le prétexte qu'il ne « lui avait rien fait. »

Hanel vivait dans le présent, l'instant. Que lui importait l'avenir et le passé.

Ce ne fut qu'à 13 ans qu'il trouva quelque chose digne d'attention. Non pas les filles ni les garçons, qu'il regardait secrètement depuis déjà longtemps, mais la cuisine de sa mère. Elle avait pris l'habitude de lui faire faire ses leçons dans la cuisine, pouvant ainsi le surveiller et l'empécher de rêver à autre chose, et lui, ne trouvant rien à faire, se prit aussi à la regarder faire. Couper, moudre, touiller, mélanger, il n'en loupait pas une miette, et rapidement il se mit à expédier son travail le plus vite possible, révélant sans le savoir par la même ses capacités, afin de pouvoir l'aider. Que la cuisine ne soit pas vraiment le travail des garçons n'avait aucune importance, et il faisait plaisir à ses deux parents qui le complimentaient toujours.
Et à l'école, ce fut pire. Une fois qu'on se rendit compte qu'au final, ses notes moyennes n'étaient du qu'à un ennui de sa part, il fut rudoyé par ses professeurs, qui pensaient le faire réagir ainsi, mais ne provoquaient souvent que plus d'ennuis et un repli sur soi, et par les autres, quand on découvrit aussi qu'il suivait des cours de cuisine avec les dames du quartier. Les mots d'enfants sont les plus durs, et à 14 ans se faire traiter de femmelette ou de tapette, même lorsqu'on s'accepte bi, ce n'est jamais facile. N'ayant au final plus eu d'amis proches depuis des années, il refusa d'adresser la parole aux autres enfants, acceptant les yeux baissés leurs insultes, repoussant sans force leurs coups, veillant à ne pas être blessé à des endroits qui laisseraient des bleus pour avoir le droit de retourner au cours de cuisine.
Les choses empirèrent quand les autres se rendirent compte que tout ce qu'ils faisaient n'avaient aucun effet, et comme les profs, ils redoublèrent d'efforts, d'humiliations. Personne n'était de son coté, les rares enfants qui auraient pu le comprendre ayant trop peur d'être aussi pris pour cibles, mais il était désormais habitué. Il trouva ensuite du réconfort à faire de la course à pied le soir, et rencontra des adolescents plus âgés venant d'autres quartiers. Qui ne le jugeaient pas, qui ne le maltraitaient pas. Ses premières aventures, autant féminines que masculines, ce fut avec eux qu'il les vécut. Son tatouage, c'est une de ses rares amies, une punk, qui le lui fit. C'est à ce moment là, alors qu'il commençait à se teindre les cheveux et sécher les cours pour faire du free running que ses parents se rendirent compte que quelque chose n'allait pas. Tout le monde à l'école leur disant qu'il tournait mal et ne serait qu'un moins que rien, ils interrogèrent directement leur fils, qui ne leur cacha rien de ce qu'il subissait. Quand ils voulurent savoir pourquoi il n'avait rien dit, il eut la réponse naïve d'expliquer qu'ils n'avaient jamais demandés.

Pour éviter que de tous cotés il ne soit influencé encore plus, ils se décidèrent alors à lui faire intégrer l'école KuroiTsuki. Un cadre strict mais agréable, et il pourrait rentrer pendant les vacances. Mais un endroit sans les amis et la cuisine, voilà qui ne lui plaisait pas, et pour la première fois il tenta réellement de se rebeller, fuguant même un moment. Mais même son petit ami de l'époque lui fit comprendre que ce serait mieux pour lui. Qu'il ne devait pas gâcher ses capacités, qu'il devait se reprendre, pour ne pas finir comme lui, un rebut. Ça, Hanel l'a juste pris comme une trahison, et il ne sait pas s'il lui pardonnera un jour. C'est pour s'éloigner de lui, lui faire du mal, injustement, qu'il a finalement décidé d'accepter la proposition et de rejoindre cette école. Et au final, il s'y est plu. De l'espace, des cours pas trop ennuyeux, quitte à aller piquer ceux des élèves plus âgés, et une nouvelle ville à explorer. De quoi oublier son ancienne vie et reprendre du bon pied. Suffisamment pour assurer sa mère qu'il ne serait pas du tout contre un frère ou une sœur, et après une grossesse aux petits soins de la part de son fils et son mari, une petite fille, Iris, comme il l'avait vu dans un livre. Iris Hanabi Kang. Petite déesse dont il tapisse le mur près de son lit de photos. Seule femme dans son coeur désormais, et gare à celui ou celle qui cherchera à en prendre la place.